Débats/Discussions

publié le Vendredi 20 Août 2004

Proposition de loi

publié le Mardi 07 Octobre 2025

⚖️ Proposition de loi 

Article unique
Après l’article L. 424-7 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 424-7-1 ainsi rédigé :


Art. L. 424-7-1. — Par dérogation aux interdictions applicables aux modes et moyens de chasse, la capture du pigeon ramier (Columba palumbus), également appelé palombe, et du pigeon colombin (Columba oenas) au moyen de filets horizontaux dits “pantes” et verticaux dits “pantières” est autorisée dans les départements de la Gironde, des Landes, du Lot-et-Garonne, du Gers et des Pyrénées-Atlantiques, lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être démontrée.

Cette pratique ne peut être exercée que sur des installations déclarées auprès de la fédération départementale des chasseurs et faisant l’objet d’une autorisation annuelle individuelle délivrée sous le contrôle de l’État.

Les dispositifs utilisés présentent, par leur conception même – mailles larges réglementées, déclenchement manuel, périodes d’ouverture strictement limitées à la migration – une sélectivité naturelle excluant la capture d’espèces non visées.

Les captures doivent être réalisées dans des conditions garantissant la conservation des populations migratrices et la traçabilité des prélèvements.

Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article, notamment :
– les règles de déclaration, de contrôle et de suivi scientifique ;
– les conditions d’information du public et de publication annuelle des données ;
– les critères attestant du caractère de tradition locale ininterrompue des installations.

Le ministre chargé de la chasse publie chaque année un rapport national présentant le bilan des autorisations, des contrôles effectués et de l’évaluation scientifique des effets de cette pratique.

? Exposé des motifs

La présente proposition vise à reconnaître et encadrer la chasse traditionnelle au filet du pigeon ramier (palombe) et du pigeon colombin, pratiquée dans cinq départements du Sud-Ouest.
Des archives attestent l’existence des pantières dès le XVIIᵉ siècle, témoignant d’une transmission ininterrompue de savoir-faire et d’une place centrale dans le patrimoine rural gascon et landais.

Les dispositifs employés, pantes et pantières, consistent en des filets à mailles larges déclenchés manuellement par le chasseur lorsqu’un vol de palombes ou de pigeons colombins se pose sur la zone d’appel.
Cette technique, par sa conception et son mode d’action, est hautement sélective :
aucune espèce non visée n’est capturée, et les prises se limitent aux deux espèces précitées, toutes deux non menacées et autorisées à la chasse.

L’encadrement proposé concilie la préservation de ce patrimoine culturel immatériel et le respect des exigences de la directive 2009/147/CE, dont l’article 9 autorise les dérogations fondées sur des motifs culturels ou traditionnels, à condition que la sélectivité et la durabilité soient garanties.

Le texte s’inspire directement de la solution validée par le Conseil constitutionnel (décision n° 2012-271 QPC) reconnaissant que le législateur peut tenir compte de traditions locales ininterrompues pour établir un régime dérogatoire particulier.

L’autorisation annuelle par la fédération départementale, sous le contrôle de l’État, permettra de maintenir une traçabilité complète des installations et des prélèvements.
Un suivi scientifique indépendant et un rapport public annuel assureront la transparence et la conformité du dispositif avec les objectifs de conservation de la faune sauvage.

Ainsi, loin d’être un passe-droit, la présente proposition établit un cadre légal moderne, équilibré, garantissant à la fois la protection de la biodiversité et la pérennité d’une pratique séculaire constitutive de l’identité du Sud-Ouest.

 

 

? Décret en Conseil d’État – Projet d’article type

(ce texte s’intègre au Code de l’environnement, après le nouvel art. L.424-7-1)


Article 1 – Objet

Le présent décret fixe les conditions d’application de l’article L. 424-7-1 relatif à la capture du pigeon ramier (palombe) et du pigeon colombin au moyen de filets horizontaux dits “pantes” et verticaux dits “pantières”, dans les départements de la Gironde, des Landes, du Lot-et-Garonne, du Gers et des Pyrénées-Atlantiques.


Article 2 – Autorisations

  1. La pratique ne peut être exercée que sur des postes existants, déclarés et géolocalisés, disposant d’un numéro d’identification unique délivré par la fédération départementale des chasseurs.

  2. L’autorisation est personnelle, annuelle et non transférable. Elle est annulée après trois années consécutives de non-renouvellement.

  3. Chaque poste doit être tenu à jour dans un registre départemental, consultable par les services de l’État.


Article 3 – Registre des captures

  1. Tout chasseur autorisé tient un registre de capture, en format numérique via la plateforme nationale agréée par le ministère chargé de la chasse (notamment le Groupement d’intérêt pour la faune sauvage – GiFS) ou, à défaut, en format papier.

  2. Le registre mentionne pour chaque jour d’activité : la date, l’heure, le nombre d’individus capturés par espèce, et les observations naturalistes.

  3. Les données agrégées par département sont transmises annuellement à l’OFB et au comité national d’évaluation.

  4. Une synthèse nationale est publiée chaque année sur le site du ministère chargé de la chasse.


Article 4 – Sélectivité et conditions d’exercice

  1. Les dispositifs de capture doivent répondre aux normes de mailles définies par arrêté ministériel, assurer un déclenchement manuel, et ne peuvent être utilisés que pendant la période de migration automnale fixée par arrêté préfectoral.

  2. Aucune capture d’espèce non visée ne peut être conservée ; tout oiseau autre que le pigeon ramier ou le pigeon colombin est immédiatement relâché.

  3. L’installation de nouveaux postes est interdite ; seuls les postes autorisés avant la promulgation de la loi peuvent être maintenus.


Article 5 – Contrôle et suivi

  1. Le contrôle de l’application du présent décret est assuré par les agents de l’OFB, les services déconcentrés de l’État, et, le cas échéant, par les agents assermentés des fédérations départementales habilités par le préfet.

  2. Les résultats des contrôles sont transmis annuellement au comité national d’évaluation.


Article 6 – Comité national du patrimoine cynégétique et faunistique

  1. Il est institué un Comité national du patrimoine cynégétique et faunistique, placé conjointement sous l’autorité du ministre chargé de la transition écologique et du ministre chargé de la culture.

  2. Ce comité comprend :

    • deux représentants de chacun des ministères co-présidents,

    • deux représentants du Muséum national d’histoire naturelle,

    • deux représentants de l’OFB,

    • un représentant du CNRS ou d’un établissement d’enseignement supérieur,

    • un représentant du GiFS,

    • un représentant de chaque fédération départementale concernée.

  3. Le comité évalue chaque année :

    • l’évolution des populations migratrices,

    • la conformité des captures avec les objectifs de conservation,

    • l’évolution du nombre de postes actifs,

    • les éventuelles modifications techniques à recommander.

  4. Le comité remet au Gouvernement et au Parlement un rapport public annuel, rendu accessible en ligne.


Article 7 – Entrée en vigueur

Le présent décret entre en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant sa publication.
Les autorisations délivrées au titre de l’année en cours demeurent valides jusqu’à leur échéance.

 

 

Note d’accompagnement parlementaire complète

 

?? Proposition de loi visant à la reconnaissance et à l’encadrement de la chasse traditionnelle au filet du pigeon ramier et du pigeon colombin


? 1. Contexte et enjeu national

La chasse au filet de la palombe et du pigeon colombin, au moyen de pantières et pantes, constitue l’une des plus anciennes formes de chasse de France.
Des archives attestent sa pratique dès le XVIIᵉ siècle dans les Landes, le Gers, la Gironde, le Lot-et-Garonne et les Pyrénées-Atlantiques.
Transmise de génération en génération, elle représente un patrimoine culturel immatériel rural aussi vivant que nos langues, nos fêtes locales ou nos arts culinaires.

Or, ces dernières années, cette pratique a été fragilisée juridiquement : les recours successifs devant le Conseil d’État, et plus récemment la saisine du Conseil constitutionnel puis de la Cour de justice de l’Union européenne, ont créé une insécurité permanente pour les chasseurs et les territoires concernés.

L’objet de la présente proposition est de sanctuariser une tradition locale ininterrompue, tout en garantissant sa conformité au droit européen et aux objectifs de conservation des espèces.


? 2. Fondement juridique

La démarche s’inspire de l’article 521-1 du Code pénal, qui reconnaît l’exception des courses de taureaux dans les régions à tradition locale ininterrompue – dispositif validé par le Conseil constitutionnel (décision n° 2012-271 QPC).

De la même manière, le présent texte inscrit dans le Code de l’environnement un article L. 424-7-1, autorisant la chasse au filet du pigeon ramier (palombe) et du pigeon colombin, dans cinq départements précis, lorsque la tradition est attestée.

Cette reconnaissance législative fonde un régime dérogatoire stable, distinct des simples arrêtés annuels contestables, et conforme à la directive européenne 2009/147/CE (« directive Oiseaux »), dont l’article 9 autorise des dérogations lorsqu’il n’existe aucune autre solution satisfaisante et que la capture est sélective et limitée.


? 3. Garanties apportées

Le texte encadre la pratique de façon stricte :

  • Autorisation annuelle nominative, délivrée par la fédération départementale des chasseurs sous contrôle de l’État ;

  • Postes géolocalisés et numérotés, interdiction de création de nouveaux postes ;

  • Filets à mailles larges, déclenchement manuel, période limitée à la migration ;

  • Registre national des captures, géré par le GiFS (plateforme commune), avec version papier autorisée ;

  • Suivi scientifique indépendant assuré par un comité mixte (OFB, MNHN, CNRS, fédérations) ;

  • Rapport public annuel au Parlement et au Gouvernement ;

  • Clause de réexamen quinquennale.

Ces garanties permettent de démontrer la sélectivité totale du mode de chasse (seules les deux espèces autorisées sont capturées) et la durabilité des prélèvements.


? 4. Comparaisons européennes

Plusieurs États membres ont déjà adopté des lois spécifiques pour concilier tradition et biodiversité :

  • Malte : loi-cadre sur les dérogations culturelles (capture printanière de fringillidés) avec quotas et suivi GPS ;

  • Espagne : reconnaissance régionale du parany comme bien d’intérêt culturel malgré l’interdiction communautaire ;

  • Pays nordiques : maintien des droits de chasse traditionnels samis pour motifs culturels ;

  • France (corridas) : exception territoriale validée par la jurisprudence constitutionnelle.

Le texte proposé place la France dans une démarche européenne cohérente : préserver la diversité culturelle tout en respectant la biodiversité.


? 5. Intérêt pour l’État et l’Europe

  • Éteindre le contentieux permanent : en donnant une base législative claire, on réduit les recours contre les arrêtés préfectoraux.

  • Offrir un modèle équilibré : la France montrerait à Bruxelles qu’elle sait concilier patrimoine vivant et objectifs environnementaux, en créant un dispositif pilote encadré scientifiquement.

  • Renforcer la cohésion territoriale : cette chasse fait partie intégrante de l’identité du Sud-Ouest ; sa disparition accentuerait le fossé culturel entre territoires ruraux et institutions nationales.


? 6. Position que la France peut défendre à Bruxelles

La France peut soutenir que :

  1. La directive Oiseaux date de 1979 ; elle doit être actualisée pour intégrer les pratiques patrimoniales encadrées.

  2. Les techniques modernes de contrôle et de suivi (déclenchement manuel, registres numériques, caméras, traçabilité) permettent aujourd’hui une sélectivité totale, rendant obsolètes les interdictions générales.

  3. Ce modèle de gestion adaptative constitue une bonne pratique de gouvernance entre État, scientifiques et acteurs locaux.


? 7. Conclusion

La présente proposition ne vise pas à créer une exception de convenance, mais à donner un cadre moderne, transparent et européen à une pratique ancestrale, sélective et durable.
Elle permet à la France de préserver un patrimoine culturel unique, sans renoncer à ses engagements environnementaux.


? Contact de suivi technique :
Groupement d’intérêt pour la faune sauvage (GiFS)
En lien avec les fédérations départementales de chasse du Sud-Ouest.

 

“La France protège son patrimoine vivant : la chasse au filet de la palombe, alliance séculaire entre nature, migration et culture.”

 

 

?? FICHE SYNTHÈSE — Proposition de loi : reconnaissance et encadrement de la chasse traditionnelle au filet de la palombe et du pigeon colombin


? Objectif

Préserver une pratique patrimoniale séculaire — la chasse au filet de la palombe (pigeon ramier) et du pigeon colombin — tout en garantissant sa conformité au droit européen et à la conservation des espèces.


?️ Une tradition vivante du Sud-Ouest

  • Pratiquée depuis le XVIIᵉ siècle, attestée par des archives dans le Gers, les Landes, la Gironde, le Lot-et-Garonne et les Pyrénées-Atlantiques.

  • Basée sur des savoir-faire transmis de génération en génération.

  • Filets à mailles larges et déclenchement manuel → sélectivité naturelle : seules les palombes et les colombins sont capturés.

  • Un symbole culturel fort du lien entre l’homme, la migration et la nature.


⚖️ Cadre juridique proposé

Article L.424-7-1 du Code de l’environnement

Autorise, dans 5 départements, la capture au moyen de pantières et pantes du pigeon ramier et du pigeon colombin, lorsqu’une tradition locale ininterrompue est démontrée.
Encadrement : autorisation annuelle nominative, postes géolocalisés, contrôle scientifique, transparence publique.

Décret en Conseil d’État

Fixe les normes techniques, le suivi scientifique (OFB/MNHN), la gestion du registre national (GiFS) et la publication annuelle des données.


? Garanties et transparence

✅ Autorisation annuelle nominative (annulée après 3 ans sans activité)
✅ Postes géolocalisés et numérotés, pas de nouveaux sites
✅ Suivi scientifique indépendant (OFB + MNHN + CNRS + fédérations)
✅ Registre national des captures (plateforme GiFS + version papier)
✅ Rapport public annuel au Parlement
✅ Comité national mixte « Patrimoine cynégétique et faunistique » (Écologie + Culture)


?? Compatibilité européenne

  • Conforme à l’article 9 de la directive 2009/147/CE (“directive Oiseaux”)

  • Pratique sélective, limitée et contrôlée

  • S’inscrit dans la perspective d’une actualisation de la directive de 1979 pour reconnaître les pratiques culturelles encadrées.


? Références comparatives

  • ?? Malte : loi-cadre sur les dérogations culturelles encadrées

  • ?? Espagne : reconnaissance régionale du parany comme bien d’intérêt culturel

  • ?? France : exception territoriale validée pour les courses de taureaux (décision n°2012-271 QPC)


?️ Intérêt pour la France

  • Stabiliser juridiquement une pratique contestée chaque année

  • Donner un modèle européen équilibré entre tradition et biodiversité

  • Valoriser le patrimoine vivant des territoires ruraux

  • Apaiser le débat entre chasse, écologie et culture


?️ Départements concernés

Gironde – Landes – Lot-et-Garonne – Gers – Pyrénées-Atlantiques